mercredi 8 janvier 2025

LES COMMUNISTES DU CHABLAIS POUR LE DESENCLAVEMENT DE NOTRE TERRITOIRE

 LA MULTIMODALITE DES TRANSPORTS AU COEUR DU POSITIONNEMENT DES COMMUNISTES DU CHABLAIS

Nous avons assisté aux 2 premières réunions d’information publique organisées à Perrignier et à Allinges avec l’aide des pouvoirs publics par la société AMEDEA qui a remporté en octobre dernier l’appel d’offres lancé par l’État concernant la concession de l'autoroute A412 pour 55 ans (environ 5 ans de construction et 50 ans d’exploitation).

Il est temps pour nous de donner notre point de vue et de proposer des axes d’actions à nos concitoyens chablaisiens.

Il y a près de 50 ans déjà les élus communistes du Chablais de l'époque revendiquaient le désenclavement de notre territoire.

Ils prônaient aussi la multimodalité des transports avec d'un côté pour le routier le doublement de ce qui est devenu la RD1005 et la RD1206 mais aussi de l'autre côté pour les autres moyens de transport avec l'amélioration de la ligne ferroviaire et des liaisons lacustres et l'extension des transports par bus.

Cette orientation n’a jamais quitté les communistes du Chablais qui sont néanmoins obligés de s’adapter pragmatiquement aux évolutions intervenues jusqu'à présent au cours des décades précédentes.

Voir le témoignage de notre camarade et ex Maire de Cervens, Jean-Claude Reynaud à la fin de l'article


AUTOROUTE A412: une histoire qui n’est pas terminée !

En effet, aujourd'hui, les retards pris pendant des lustres aboutissent à une solution très bancale qui est cet autoroute A412 payant qui va aller de Machilly à Thonon en complément des infrastructures maintenant existantes.

L'usage de la voiture et du camion ne va pas disparaître alors que les véhicules routiers sont appelés à se transformer en ce moment de transition vers l'électrique (et aussi vers l’hydrogène?): mais il faut pourtant justement chercher à le réduire au travers de l’option multimodale du transport de personnes et des marchandises.

Il faut admettre que l'explosion de la population dans notre territoire, qui doit se poursuivre d'après les estimations prospectives récentes, a entraîné un trafic routier que les infrastructures actuelles  comme les habitants des communes traversées, concernés au premier chef, ne peuvent plus supporter à cause des multiples ennuis qu'il leur cause: pollutions, bruits, dangers, retards qui touchent aussi les transports collectifs par bus.

L’État s'était initialement engagé à financer cet autoroute quand les élus de nos collectivités locales ont accepté de financer le contournement de Thonon que nous utilisons tous maintenant sans aucun scrupule.

Mais l’État a décidé par la suite de se retirer et de recourir à un contrat de concession auprès d'une société privée pour construire et exploiter le nouvel autoroute A412, dans la logique de la privatisation scandaleuse des autoroutes développés pourtant sur fonds publics.

Ainsi les Chablaisiens vont subir la double peine: ils ont participé au financement du contournement de Thonon et ils devraient payer à partir de 2029 l'usage de ce nouvel autoroute.

Ceci est inacceptable, d'autant plus que notre Conseil Départemental de Haute Savoie va consacrer 200 Millions d'Euros pour doubler la RD entre le carrefour des Chasseurs et l'Autoroute A40 près du CHAL.

Deux poids, deux mesures avec cette idée répandue mais plutôt erronée que le trafic journalier est principalement dû aux trajets des travailleurs frontaliers et que ces derniers peuvent payer (comme cela était déjà l’idée pour le nouveau parking privé à la gare de Thonon).


AUTOROUTE A412: Alors, que faire maintenant que le projet est lancé?

D'abord, nous reconnaissons les efforts de conception pour minimiser les impacts environnementaux (faune, hydrologie, bruits, vues paysage) de ce projet qui inclut des pistes de véloroute à proximité de l’A412 pour rejoindre les gares de Machilly, de Bons et Perrignier et la suppression de deux passages à niveaux (cette opération étant financée par notre Conseil Départemental qui profite de la présence des moyens adhoc du groupe Eiffage).

Il importe dans un premier temps que la construction de l’A412 ne crée pas des nuisances nouvelles pour la population : le tracé de l’A412 tel que présenté lors de la 2ème réunion ne s’inscrit pas vraiment dans le nord de la bande des 300 m retenue suite à l’enquête d’utilité publique comme cela avait été signifié pendant la 1ère réunion.

Ainsi le hameau de Mésinges voit l’autoroute à peine à plus de 50 m des dernières habitations, ce qu’il faudrait corriger au plus vite.

Il importe aussi que rien ne pénalise, pour le futur, sur toute la longueur de l’A412, le doublement de la ligne ferroviaire.



Ainsi, le pont rail à construire au dessus de l’autoroute près du hameau de Mésinges doit pouvoir dès maintenant supporter le passage de 2 voies. Même si on peut comprendre que les premières améliorations de la ligne pour augmenter la fréquence des trains pour les passagers mais aussi pour le fret de marchandises peuvent être obtenues avec un doublement partiel de la ligne, il faut dès aujourd’hui s’inscrire dans la visée du doublement total de la ligne de Thonon à Annemasse. Reste le sort de la ligne entre Thonon et Evian et bien entendu celui de la ligne du Tonkin entre Evian et Saint Gingolf.

La tarification n’est pas encore connue mais devrait être suivant la présentation dans les alentours hauts de celle de l’A40 par exemple, avec la possibilité d’abonnements mensuels et une remise pour les véhicules Critair 1.

Le modèle retenu par la société AMEDEA est un report rapide sur l’A412 de 70 % du trafic actuel de la RD903 (20 000 véhicules par jour actuellement) et de 30 % du trafic actuel de la RD1005 (aussi 20 000 véhicules par jour).

Nous nous interrogeons sur le montage industriel et encore plus sur le montage financier proposé par le groupe Eiffage et qui a été accepté par l’État puisque ces montages peuvent être sources de possibles "détournements" et d’optimisations fiscales comme savent si bien le faire ces très grandes entreprises qui multiplient les filiales.

La société AMEDEA a été spécialement créée par le groupe EIFFAGE pour porter la réponse à l’appel d’offres, puis pour assurer la conception et la construction de l’autoroute et enfin  l’exploitation de ce dernier jusqu’à la fin de la durée de la concession. Le budget prévisionnel pour la construction est estimé à 315 millions d’euros.

Cette société va en fait rester quasiment une coquille vide puisque la conception et la construction vont être confiées à des filiales spécialisées d’EIFFAGE et l’exploitation sera effectuée par AREA, une filiale de la société APRR, elle-même filiale du groupe EIFFAGE

Quels vont être les prix internes entre les filiales de conception et de construction d’EIFFAGE et AMEDEA ?

Qui sont les prêteurs financiers d’AMEDEA et à quels taux et pour quelles durées sont prévus les emprunts successifs qui interviendront pour concevoir et construire l’autoroute ?

Comment est envisagée la répartition des résultats de l’exploitation entre AREA et AMEDEA ?

Comment se passeront les choses si AMEDEA se retrouvait en défaut de remboursement des emprunts ?

Quel niveau de rentabilité est visé par EIFFAGE pour ce projet sur la durée de la concession ?

Autant de questions qui méritent l’attention de toutes et tous: malgré le fait que le contrat de concession publié au Journal Officiel soit expurgé de données classées "secret des affaires", nous exigeons d’avoir au plus vite des réponses claires et précises que les Chablaisiens doivent connaître.

AUTOROUTE A412: il doit être gratuit pour les chablaisiens!

Nous voulons la gratuité au moins pour tous les Chablaisiens, particuliers comme salariés d'entreprise locales et salariés frontaliers.

Les pistes de financement pour cette gratuité sont multiples:
  • utilisation des fonds versés par le canton de Genève au Département, tant pour les particuliers que pour les entreprises chablaisiennes:

On annonce par exemple que ce fond va atteindre 301 millions d'euros pour l'année 2024: une partie de cette somme, dont peu connaissent en fait précisément l'utilisation, pourrait donc servir à financer l'usage gratuit pour les Chablaisiens et les entreprises locales.

En ce sens, on peut en plus imaginer qu'une provision soit effectuée par le Département dès cette année jusqu'à l'ouverture de l'autoroute en début 2029.

Cela oblige à mettre en place un mécanisme de paiement entre la société AMEDEA et le Département auprès duquel les Chablaisiens devront déclarer la plaque d'immatriculation de leur véhicule puisque c'est le moyen utilisé par les portiques de flux libre sur l'A412 pour identifier les véhicules empruntant l'autoroute.

  • versement d'une prime transport ou remboursement aux salariés frontaliers par les entreprises suisses qui les emploient.

Pour tout cela il faut obtenir que le préfet de Haute Savoie et le président de notre Conseil Départemental acceptent de nous rencontrer et de fournir toutes les explications nécessaires.

A PROPOS DES TRANSPORTS EN CHABLAIS

En ouvrant plus largement notre vision, il est évident pour nous que le sujet des transports est très important dans notre territoire du Chablais.

Il est donc nécessaire, voire impératif, de se mobiliser et de travailler ensemble, élus, partis, syndicats et associations, pour trouver des solutions d’améliorations.

La question des financements se pose bien évidemment : mais des pistes existent quant on voit par exemple les dépenses somptuaires de la ville de Thonon qui ne servent pas vraiment les habitants, plutôt orientés à améliorer de façon factice la vitrine de la ville principale du Chablais.

Il faut aussi taper dans le portefeuille des entreprises, puisque par exemple l’agglo de Thonon consacre 4 millions d’euros par an pour la ligne lacustre Thonon-Lausanne.

Les projets à développer sont multiples comme l’extension de la fréquence des trains et du Leman Express, le rétablissement de la ligne du Tonkin, les transports par bus et notamment la ligne de bus « haute hauteur » sous la responsabilité de Thonon Agglomération en direction de Genève.

A nous toutes et tous alors de nous impliquer pour faire avancer tous ces dossiers en connaissance de cause, en s’appuyant sur toutes celles et tous ceux qui souhaitent vraiment rendre service à toute la population du Chablais.

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TEMOIGNAGE 
DE JEAN-CLAUDE REYNAUD
(EX MAIRE DE CERVENS)


Alors maire adjoint de Cervens, et en accord avec mon maire Armand VUAGNOUX, j'ai lancé une initiative pour fédérer les communes de la côte.
 
Ce dans les années 80 – 85. Des questions importantes ont été soulevées par les élus et notamment déjà  la circulation sur la départementale (*) traversant les communes de Bons en Chablais, Brenthonne, Lully, Perrignier.

Élu président de la structure du syndicat de la Côte, j'ai alors entrepris une série de démarches d'abord auprès de nos collègues du Bas Chablais qui n'ont pas voulu être associés n'en voyant pas l'intérêt. 

J'ai alors contacté Max Décarre responsable des routes pour le Conseil Général. Une entrevue avec le président du Conseil Général Bernard PELLARIN a été organisée : après discussion il nous fait la proposition suivante : «L'ATMB a de l'argent, pourquoi ne pas faire une autoroute ? ». Ce fut le départ du dossier. 

Lorsque le maire d'Annecy Bernard BOSSON est devenu ministre des transports il a lancé le projet. L'État avait déjà commencé à acheter des terrains lorsque le tribunal administratif a annulé la décision après un recours de l'ACPAT (action contre le projet de l'autoroute) en raison de l'insuffisance du dossier concernant notamment toutes les hypothèses a faire apparaître dans l'avant-projet. 

Il faudra attendre le ministère de Jean-Claude GAYSSOT (**) pour que le projet soit reformulé sous la forme d'un schéma multimodal incluant la voie express, la voie ferrée et les transports publics. Pour la voie express, le financement était assuré par l'État, le Conseil Général et les communes sur le tronçon allant de Machilly à Thonon y compris le contournement.

Le Conseil Général a proposé de distinguer 2 opérations: la jonction Machilly Thonon  d'une part prise en charge totalement par l'État, les collectivités locales prenant en charge totalement le contournement de Thonon.

Les collectivités ont réalisé ce qui était convenu mais par contre l'État n'a jamais respecté son engagement : tous les ministres qui se sont succédés – de droite ou socialistes – ont refusé de lancer le projet en le renvoyant aux calendes grecques.
On peut regretter que l'ensemble des élus du Chablais ne se soient pas élevés contre le refus de l'État de respecter ses engagements.

Finalement le Conseil Général et la Région ont donc repris le projet avec l'idée de le financer par un système à péage. Nous en sommes là.

Pour les Chablaisiens, ce serait la double peine puisque nous avons financé notre part et que nous somme appelés à payer le péage.

Les atermoiements de toutes ces années n'ont pas contribué à faciliter l'émergence du projet. Si l'on veut résoudre correctement le problème de la circulation il n'y a pas d'autre alternative, l'idée d'aménager les voies existantes est un leurre car s'il veut être efficace il consommera également beaucoup de terrain.

Nous nous trouvons au cœur du problème de la gestion de l'espace, il est légitime de réserver des terrains pour les projets structurants à condition d'avoir une politique globale de gestion de l'espace et de préservation des espaces naturels. Le mitage existant dans le Chablais est le fruit d'une politique au coup par coup : il est plus impactant que la création d'une voie rapide mais il est plus insidieux.

Je rappelle que le projet a été très largement légitimé lors de l'enquête d'utilité publique, que les règles concernant les autoroutes comportent de très fortes contraintes pour préserver l'environnement.

Au point où nous en sommes, il n'est plus temps d'exprimer des regrets, par contre nous devons être vigilants sur les conditions de la mise en œuvre du projet pour limiter les impacts.

Je note que le contournement de Thonon n'a pas fait l'objet d'une remise en cause alors que les impacts environnementaux sont de même nature que le projet autoroutier. Qui ne mesure aujourd'hui l'intérêt de cet ouvrage ? 

Il n'y a pas de raison pour que les populations des zones périurbaines soient sacrifiées, elles ont le droit de vivre dans des espaces correctement organisés.

Jean-Claude Reynaud 

(*) RD903
(**) Ministre communiste (à l'époque) des transports dans le gouvernement Jospin de la gauche plurielle (1997-2002)