Pour des Centres Publics de Santé
La Sécurité Sociale, telle qu’elle a été conçue il y a tout juste 80 ans, est peu a peu remise en cause. La solidarité devient illusoire quand, désormais, les assurances complémentaires prennent le relais des remboursements en fonction des contrats souscrits. La hausse constante des restes à charge aboutissent à des renonciations aux soins, même indispensables. L’Etat se substitue aux partenaires sociaux pour fixer le budget de la sécurité sociale en deçà des besoins, notamment des hôpitaux.
Avec les déserts médicaux, 7 millions de personnes n’ont pas accès à un médecin traitant, (95 000 en Haute-Savoie), dont 472 000 en affection de longue durée. La Haute-Savoie ne fait pas exception : Annecy, Annemasse, Thonon, Evian, nos vallées, voient le nombre de médecins diminuer avec les départs en retraite des praticiens, sans solution à moyen terme.
Les Centres Publics de Santé, recrutant des professionnels salariés, permettant un exercice en équipe pluridisciplinaire, un suivi des soins dispensés obligatoirement avec tiers-payant et le développement de mesures de prévention, pourraient être un des moyens d'améliorer cette situation avec le soutien actif des élus et l’appui de la population.
Développer de telles structures de proximité est un choix politique. Des initiatives locales existent déjà : aux citoyens de s’en emparer !
Le but de la réunion publique de ce 23 mars, à l’initiative du Collectif Santé Chablais, appuyé par les partis du NFP, des organisations syndicales et citoyennes, est d’en finir avec la résignation et de peser dans les choix électoraux à venir, en particulier lors des élections municipales : une autre politique de santé est possible, y compris au niveau communal , départemental et régional.
Des propositions pour élaborer un projet de loi, initiées par les acteurs nationaux de centres de santé, intitulé « Pour un réseau national de centres de santé de service public » sera présenté à cette occasion par l'un de ses rédacteurs.
Le docteur Richard Lopez, président national de la Fabrique des centres de santé
Vendredi 23 mai à 20h à l'auditorium de Margencel
Tous les élus du département, maires, conseillers départementaux, conseillers régionaux, parlementaires, ainsi que tous les professionnels de santé libéraux et publics seront conviés.
Michel Vuillaume 1er Mai 2025
Article journal l'Humanité du 02 05 2025
91 kilomètres de long et une énergie de collision multipliée par 10 : pourquoi le Cern veut construire un accélérateur de particules géant ?
L’Organisation européenne pour la recherche nucléaire (le Cern) envisage la construction d’un nouveau collisionneur de 91 kilomètres de long pour explorer les zones d’ombre de la physique. Au-delà des découvertes espérées, son coût financier et écologique divise les chercheurs.
Sous la frontière franco-suisse, le futur collisionneur circulaire (FCC) est conçu comme le prolongement de son prédécesseur, le grand collisionneur de hadrons (en anglais LHC), lancé en 2008 par l’Organisation européenne pour la recherche nucléaire (Cern). Mais à une tout autre échelle : un tunnel de 91 kilomètres contre 27 aujourd’hui, une énergie de collision des particules multipliée par 10 et une nouvelle ambition scientifique.
« L’idée, c’est de reproduire ce qui avait été fait avec les précédents accélérateurs, le LEP (grand collisionneur électron-positron jusqu’en 2000 – NDLR) puis le LHC, explique Jean-Paul Burnet, responsable des infrastructures techniques du FCC au Cern. C’est-à-dire commencer par un collisionneur électron-positron, puis, dans un second temps, installer un collisionneur proton-proton dans la même infrastructure. » Une stratégie en deux temps (2045-2070 puis 2070-2095) pensée pour durer jusqu’à la fin du siècle.
Espérée vers 2040, la machine vise notamment à mieux comprendre le big-bang et à mettre à l’épreuve le modèle standard – la théorie décrivant le comportement des particules élémentaires. « Avec le FCC, on pourra produire plusieurs dizaines de milliards de bosons de Higgs, contre quelques millions avec le LHC, et les étudier avec une précision inédite », précise le chercheur.
Un gigantisme qui ne convainc pas tout le monde
Mais voilà, le gigantisme du projet, dont la décision de lancement sera prise en 2027, rencontre de nombreuses oppositions. En février, une tribune signée par 400 scientifiques appelle à renoncer à ce méga-collisionneur de particules qui nécessite un investissement colossal de 16 milliards d’euros.
« À l’heure de l’urgence écologique, est-il encore souhaitable de développer et de financer des infrastructures de recherche scientifique énergivores, coûteuses, délétères pour l’environnement et les populations, et aux retombées scientifiques incertaines ? », interrogent les détracteurs qui listent les griefs : lourdes émissions de CO2, consommation démesurée d’électricité, rareté du cuivre, danger sismique, coût aléatoire… Le tout pour un gain scientifique très hypothétique.
Mais, pour le physicien Patrick Janot, coordinateur des expériences FCC, l’enjeu dépasse la seule découverte de nouvelles particules : « Même si on ne trouve rien, cela signifie que certaines théories ne sont pas valides. Et, sur le plan économique, les retombées sont très concrètes. Je rappelle que 1 euro investi dans le LHC a généré plusieurs euros de retour économique », grâce aux innovations technologiques, aux transferts industriels et à la formation. Le FCC est aussi pensé avec une conscience environnementale. « On veut intégrer des systèmes de récupération de chaleur », souligne Jean-Paul Burnet en donnant l’exemple du réseau alimenté par le LHC qui profitera bientôt à Ferney-Voltaire (Ain).
Des arguments loin de convaincre les opposants, qui appellent à différer de tels investissements au profit du combat contre le réchauffement climatique, prioritaire. « Notre espèce aura encore des dizaines de millions d’années devant elle pour tenter d’élucider les premières microsecondes suivant le Big-Bang, écrivent-ils. Ou peut-être que cette parcelle de connaissance nous restera à jamais inaccessible, et qu’il nous faudra réussir à l’accepter. »
Arnaud Marsollier, porte-parole du Cern, se veut rassurant. Et met en avant la collaboration mondiale sur laquelle repose le FCC. « Le budget du Cern, c’est celui d’une université moyenne, mais réparti sur 24 États membres », rappelle-t-il. « C’est un projet pour l’humanité », ajoute Patrick Janot. Reste à savoir si l’humanité est pour ce projet.
Le point de vue de…
Patrick Janot, coordinateur de la physique et des expériences FCC
Comment convaincre le grand public et les décideurs de l’utilité d’un tel projet alors que ses retombées sont parfois invisibles à court terme ?
Il faut distinguer les retombées scientifiques fondamentales et les retombées indirectes. Certaines retombées indirectes peuvent être immédiates. Par exemple, 1 euro investi au Cern rapporte 3,70 euros à la France, qui bénéficiera de la création de nombreux emplois. L’engagement récent du Cern sur quinze ans a également permis à trois projets de centrales photovoltaïques en France d’obtenir un financement pour sortir de terre. La recherche fondamentale, quant à elle, apporte une connaissance intime des lois qui gouvernent la matière et l’énergie. Cette connaissance conduit, à plus ou moins court terme, à améliorer la condition humaine.
Quelles sont, selon vous, les avancées technologiques les plus inattendues que le FCC pourrait générer, comme le Web l’a été pour le LHC ?
De l’invention de la machine à vapeur à la domestication de la fée électricité, la science a démocratisé l’accès à l’énergie. Les particules d’antimatière sont des outils modernes de la médecine. La mécanique quantique conditionne le fonctionnement de nos ordinateurs, de nos téléphones. La relativité d’Einstein permet de nous repérer dans nos déplacements. D’autres avancées technologiques pourraient venir de la manière d’exploiter les données du FCC, comme l’utilisation de l’IA appliquée à la conduite autonome de véhicules. Il est plus difficile de parler de retombées inattendues, car elles sont… inattendues !
Face à l’urgence climatique et aux priorités sociétales actuelles, comment justifiez-vous la place d’un projet scientifique de cette ampleur dans l’agenda mondial ?
Pour sa construction et son fonctionnement, l’empreinte carbone annuelle moyenne du FCC correspondra aux émissions annuelles d’environ 3 000 Français. Depuis sa conception et jusqu’à son démantèlement, son impact environnemental a été et sera minimisé en intégrant l’éthique « éviter, réduire, compenser ». Ne pas faire le FCC priverait la société de nombreuses retombées qui pourraient permettre d’améliorer l’empreinte carbone de chaque individu. La science dans son ensemble peut en effet apporter les outils pour répondre à l’urgence climatique actuelle. Par exemple, les aimants supraconducteurs à haute température dont le FCC aura besoin pourraient fournir une façon de stocker l’électricité à moindre perte et équiperont peut-être nos voitures et nos avions de demain.