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jeudi 8 mars 2018

Objet 8 mars 2018 - Journée internationale des droits des femmes

8 mars : « L'égalité ne peut plus attendre »

Tous les trois jours, une femme meurt sous les coups de son conjoint ou ex-conjoint. 84 000 viols ou tentatives de viols ont lieu chaque année, 32% des femmes ont déjà vécu une situation de harcèlement sexuel ou d’agression sur le lieu de travail...
Ces violences ne sont pas des actes isolés, elles touchent tous les milieux sociaux et toutes les générations, comme l’ont toujours dénoncé les associations féministes. Mais l’immense vague de témoignages sur les réseaux sociaux via #BalanceTonPorc ou #Metoo semble avoir révélé l’ampleur de ce fléau.

Ce continuum de violences faites aux femmes au quotidien, conséquence d'un système de domination mondialisé, le patriarcat, ne peut plus durer car non seulement il broie des vies humaines mais il empêche toute avancée vers une société de pleine égalité.
Alors, ce 8 mars, journée internationale de lutte pour les droits des femmes, à 15h40, heure à partir de laquelle elles ne sont plus payées du fait des inégalités professionnelles et salariales, les femmes quitteront le travail. Et ensemble, militantes et militants féministes, politiques, syndicalistes, défileront dans toute la France, comme un peu partout dans le monde, pour demander l’égalité entre les femmes et les hommes et la fin des violences de genre.

Pour changer les rapports de forces, il est plus que jamais indispensable que chacune et chacun se sentent concerné-e-s et descendent dans la rue. L’égalité ne peut plus attendre : nous n’avons aucune confiance dans les belles promesses faites par le Président Macron, jamais assorties de moyens ni de mesures concrètes. Nous rejetons sa politique libérale qui, de la dérégulation du droit du travail à la mise en place de la sélection à l’université renforçant l’orientation genrée, précarise les femmes et éloigne toujours plus leurs perspectives d’émancipation.
Avec les associations féministes, nous appelons à faire du 8 mars une journée de grève et de lutte pour que soit enfin respectée l’égalité professionnelle et qu'un plan d’urgence soit mis en place pour éradiquer les violences faites aux femmes. Cela passe notamment par des sanctions exemplaires aux entreprises ne respectant pas l’égalité salariale, la mise en place des 32h sans baisse de salaire, ainsi que le vote d’une loi-cadre contre les violences de genre assortie d’un budget d’au moins 5 milliards d’euros pour l’égalité femmes-hommes.
Soyons nombreuses et nombreux le 8 mars à 15h40 Place de la République à Paris.

Laurence Cohen et Hélène Bidard,, 
Responsables nationales des droits des femmes et du féminisme au PCF



8 Mars : quelles mesures 

pour améliorer les droits des femmes ?


A l’occasion de la journée internationale des droits des femmes, ce 8 mars, 
l’Humanité.fr a tendu son micro au sujet de l’égalité femmes-hommes. 
Rencontres.


CGT
Les droits des femmes  c'est tous les jours. 
Le contexte
Cette année, le thème du retenu par l’ONU est  En effet les mouvements # Me too, # Balance Ton Porc, # Maintenant on agit et  (stop aux violences faites aux femmes) ont braqué les projecteurs sur le harcèlement dont sont victimes les femmes : harcèlement sexuel, moral, à la maison, au travail, dans la rue, dans les transport. Ca a permis de ressortir des tiroirs les lois et les droits existants et d'en prévoir d'autres voire de les renforcer. Nous les rappelons dans ce tour d’horizon des droits propres aux femmes étant entendu qu’elles bénéficient aussi des droits des hommes et des citoyens. Un constat : l'abondance de textes juridiques, de mesures se heurte aux mauvaises habitudes, au laxisme, au refus d'appliquer les lois notamment le droit du travail (égalité professionnelle et salariale, harcèlement, discrimination, précarité), à l'absence de volonté des différents gouvernements de sanctionner et de se donner les moyens d'appliquer les droits... bref à la réalité.
Autorité parentale
Il est encore courant, surtout dans les administrations d’associer le père à l’autorité parentale. C’est ringard, dépassé et illégal ! La loi dit bien que l’autorité parentale est conjointe au couple marié. « Les père et mère exercent en commune l’autorité parentale », énonce l’article  Deux cas de figure peuvent se présenter : - les parents ne sont pas mariés et vivent en concubinage ou sont pacsés, c’est la mère qui bénéficie seule de l’autorité parentale ou en commun avec le père s’il a reconnu l’enfant avant l’âge d’un an (après cet âge il doit en faire la demande et répondre à des conditions), - les parents sont séparés (fin du concubinage, rupture de PACS, divorce), l’autorité parentale continue de s’exercer en commun ? C’est d’ailleurs pourquoi le parent qui quitte le logement familial doit continuer à participer à l’entretien et l’éducation de l’enfant (ou des enfants) notamment en versant une 
En savoir + sur l'

IVG, contraception, sexualité

En appelant le 0 800 08 11 11 (gratuit et anonyme) ou en cliquant sur le lien  le  vous obtiendrez toutes informations sur l’IVG, la contraception et la sexualité. Il est également possible de s’informer sur et encore sur le site du CNIDFF (Centre nationale d’information sur les droits des femmes et des familles) 
L’IVG est prise en charge sur la base d’un forfait comme précisé sur le site de l’assurance maladie  Ce forfait comprend : les analyses préalables à l’IVG, l’anesthésie locale ou générale, l’acte d’IVG et la surveillance, l’accueil et l’hébergement. Le forfait hospitalier n’est pas dû. Reste à charge : - les frais au-delà de ces forfaits, - les deux consultations préalables auprès du médecin qui sont remboursées au tarif habituel de la sécurité sociale. Les mutuelles prennent en tout ou partie du reste à charge. Les mineures sans consentement parental et les femmes bénéficiaires de la  n’ont rien à payer ni à avancer quel que soit le coût.

 Grossesse et maternité au travail

Au travail les femmes enceintes puis en maternité ont des droits : - d’abord de ne subir aucune  - ensuite à un  dont le montant de l’indemnisation (indemnité journalière) peut être calculé sur ce  - ce congé maternité peut se prolonger par un  - droit également d’allaiter son enfant durant les heures de travail, pendant 1 an à compter de la naissance de l'enfant.  Ca se concrétise par une réduction du  temps de travail d'une heure par jour répartie à raison de 30 minutes le matin et de 30 minutes l'après-midi. Attention ce n’est pas rémunéré sauf dispositions conventionnelles contraires. Cette période d'allaitement est réduite à 20 minutes si l'employeur met à disposition de la salariée un local dédié à l'allaitement, qui peut être situé à l'intérieur ou à proximité des locaux affectés au travail. - de retour dans l’entreprise après un congé maternité toute salariée retrouve son poste. Si l’employeur décide que non ou envisage un licenciement, il ne peut pas faire n’importe quoi puisqu'il existe une protection spécifique aux         

 Egalité professionnelle

Ca s’est amélioré quand on regarde l'évolution dans le temps historique et aussi le nombre de textes juridiques... mais ce n’est pas encore ça notamment en matière d’égalité salariale, de promotion, sans compter que les femmes sont davantage victimes de la flexibilité et de la précarité selon une  Vous pouvez  et prendre connaissance des derniers 
Au travail, l’employeur doit afficher le texte des articles et surtout le faire respecter notamment par un accord d'entreprise. Vous lirez avec attention l’article L3221-2 du code du travail qui dit bien : « Tout employeur assure, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l'égalité de rémunération entre les femmes et les hommes. »
Est-ce bien le cas dans votre entreprise ?
Quant à l'obligation légale d'instaurer l'égalité professionnelle, il faut savoir que, chaque année, les entreprises soumises à la négociation annuelle obligatoire (NAO) doivent engager une négociation sur les objectifs d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes en application de l'article Or selon  0,2% seulement des 60% des entreprises qui ne respectent pas cette loi ont été sanctionnées ! Elles auraient dû signer un accord (dans les entreprises de plus de 300 salariés c'est obligatoire) ou faire respecter celui existant. Le montant de cette pénalité est fixé au maximum à 1 % des rémunérations et gains versés aux travailleurs salariés ou assimilés au cours des périodes au titre desquelles l’entreprise ne sera pas couverte par l’accord ou le plan d’action. Le produit de cette pénalité est affecté au fonds de solidarité vieillesse.
C'est pourquoi, ce 8 mars 2018, 
1.- assurer l'égalité salariale et professionnelle notamment en rendant effectives les sanctions pour les employeurs qui discriminent
2.- promouvoir une parentalité partagée en augmentant l'indemnisation du congé parental et en allongeant le congé parternité ainsi que le congé maternité à 18 semaines (aux dernières nouvelles le Gouvernement entend fusionner ces deux congés?!)
3.- lutter par la prévention et la protection contre les violences sexistes et sexuelles.

 Harcèlement moral et sexuel

Vous pouvez prendre connaissance de l'abondnate législation en matière de harcèlement moral et sexuel dans l’entreprise et les recours des salariées qui en sont victimes en cliquant sur le lien  Ces dispositions légales contre le harcèlement doivent obligatoirement être affichées dans l’entreprise. Rappelons que les employeurs ont l’obligation d’assurer la sécurité et la santé mentale et physique de leurs salarié(e)s – Dans l’entreprise comme à l’extérieur et notamment dans les transports en commun, le  est un délit de même que le  Dans les transports en commun, le gouvernement a pris 
En lien

 Violence contre les femmes

énumère le droit des femmes victimes de violences et précise la 
Rappelons qu'en cas de violences, les femmes ne doivent pas hésiter à appeler le 3919 (gratuit et anonyme) ou faire appel à une  C'est important à savoir, les préfets ont reçu une relative à l'accès au logement des femmes victimes de violences ou en grande difficulté. Se renseigner en mairie ou auprès de l'aide sociale. Notre article juridique 

 Retraite

Ecart moyen de retraite entre les femmes et les hommes =  37% -chiffre du ministère de la Famille.
En droit les sont identiques entre les femmes et les hommes. Vous y lirez que le montant de la retraite dépend du nombre de trimestres d’assurance vieillesse validés.
C'est important puisque les femmes doivent savoir qu’elles peuvent bénéficier de trimestres en plus (majorations) dans les cas suivants (ces majorations se cumulent) : - 4 trimestres par enfant au titre de la maternité ou de l’adoption, - 4 trimestres par enfant au titre de l’éducation qui peuvent être toutefois partagés entre chaque parent, - 8 trimestres pour charge d’un enfant handicapé bénéficiant de l’AEEH (allocation d’éducation de l’enfant handicapé) et de son complément ou de l’AEEH et de la PCH (prestation compensatoire de handicap), - majoration de 10% du montant de la retraite pour les mères qui ont élevé au moins 3 enfants (légitimes ou adoptés) pendant au moins 9 ans avant leur 16ème anniversaire (cette majoration concerne aussi les retraites complémentaires Agirc et Arrco). Le congé parental d’éducation ouvre droit à une majoration de la durée d’assurance vieillesse à raison de 4 trimestres par année. Par exemple si vous avez pris 18 mois de congé parental vous avez droit à 6 trimestres (4 trimestres pour 12 mois + 2 trimestres pour 6 mois). Attention voir avec sa caisse d’assurance vieillesse car cette majoration ne se cumule pas avec la majoration pour enfant (voir ce qui est le plus favorable).

 A lire- - présentée à l’Assemblée nationale le 28 octobre 1791 par Olympes de Gouges (non adoptée)


Luttes des femmes. La nouvelle vague du féminisme est une déferlante mondiale

En haut, à gauche, manifestations géantes contre Donald Trump, pour la seconde « Marche des femmes », le 20 janvier (ici à Los Angeles). Mark Ralston/AFP. Mobilisation des femmes, à Varsovie (Pologne), le 3 octobre 2016, contre les initiatives du gouvernement voulant limiter le droit à l’avortement. Kacper Tempel/Reuters. Ci-contre, à droite, rassemblement contre les violences faites aux femmes, à Hyderabad (Inde), le 14 novembre 2017. Noah Seelam/AFP
Partie des États-Unis dès janvier 2017, la révolte des femmes contre les violences sexuelles alimente un mouvement qui met en cause l’imaginaire social et les rapports de pouvoir qui perpétuent les normes patriarcales, les discriminations, les inégalités.
Ce 21 février 2017, Donald Trump, investi la veille, prend ses quartiers à la Maison-Blanche. Le monde est encore sous le choc de l’élection du milliardaire, passé de la téléréalité aux plus hautes sphères du pouvoir. Ce démagogue, réactionnaire chaotique, a fait du mensonge, de la provocation et de la vulgarité ses marques de fabrique. Ses cibles favorites ? Les femmes. En 2005, lors d’une conversation avec l’animateur de télévision Billy Bush, il se vante de pouvoir, grâce à sa célébrité, « attraper » les femmes par « la chatte ». « Grab them by the pussy. » La formule, féroce, hargneuse, ordurière, sonne comme une déclaration de guerre. À peine Donald Trump installé, les femmes répliquent. Une vague de « bonnets roses » déferle sur les États-Unis. À l’appel du collectif Women’s March, plusieurs millions de personnes défilent dans les rues de 400 villes pour dénoncer la haine des femmes entretenue par le nouveau président américain et la politique rétrograde qu’il entend mettre en œuvre. À Park City, dans l’Utah, les organisateurs du festival Sundance, grand-messe du cinéma indépendant, appellent à se joindre aux manifestantes. Dans la foule des protestataires, au coude-à-coude avec des militantes féministes, emmitouflé dans un blouson noir et négligemment coiffé d’un bonnet gris, un certain Harvey Weinstein bat le pavé. L’influent producteur enchaîne les succès. Il fait la pluie et le beau temps à Hollywood. Durant la campagne présidentielle, ce généreux donateur du Parti démocrate n’a pas hésité à afficher son soutien à Hillary Clinton. Dans son appartement de New York, il a même organisé, en juin 2016, deux levées de fonds pour la candidate, en lice pour devenir la première présidente des États-Unis. Un an plus tôt, la Weinstein Company a distribué The Hunting Ground, un film documentaire consacré aux violences sexuelles sur les campus universitaires. Le 2 mai 2017, entouré de Scarlett Johansson, Sofia Coppola et Meryl Streep, Harvey Weinstein signait un chèque de 100 000 dollars lors du gala célébrant, à New York, le centenaire du Planning familial.

Weinstein, un prédateur sexuel maniant le chantage et la menace

Quand se tient cette soirée mondaine où les stars d’Hollywood exaltent le droit des femmes à disposer de leurs corps, le journaliste Ronan Farrow enquête déjà, pour le New Yorker, sur un scandale qui fera l’effet d’une bombe, avec des répliques à l’échelle planétaire. Mais le 5 octobre, c’est le New York Times qui publie, le premier, des témoignages accusant Harvey Weinstein de harcèlement sexuel durant trois décennies. Dix jours plus tard, l’enquête de Farrow compile les récits glaçants de treize femmes ayant subi des agressions sexuelles de la part du producteur. Des actrices brisent le silence. Leurs témoignages brossent le portrait d’un prédateur prêt à briser la carrière de celles qui déclinent ses avances sexuelles. Weinstein impose son pouvoir par le chantage, la menace, les pressions psychologiques, au vu et au su de ses collaborateurs. L’argent est au cœur de cette omerta. Le producteur achète le silence des victimes susceptibles de porter plainte, corrompt des journalistes, conclut même un contrat avec une agence de renseignements privée. « Je suis une femme de 28 ans essayant de construire sa vie et sa carrière. Harvey Weinstein a 64 ans, il est mondialement célèbre et c’est sa compagnie. L’équilibre des pouvoirs, c’est moi : zéro, Harvey Weinstein : dix », résume l’une de ses victimes, Lauren O’Connor, ancienne employée de la Weinstein Company.
Devant l’indignation que soulèvent les allégations d’agressions sexuelles et de viols le mettant en cause, l’ancien patron des studios Miramax, dans un premier temps, nie… tout en s’excusant : « Je me rends compte que la façon dont je me suis comporté avec mes collègues dans le passé a causé beaucoup de souffrances et je m’en excuse sincèrement. Bien que j’essaie de faire mieux, je sais qu’il reste encore beaucoup de chemin. » Trop tard : la digue est rompue, la peur se dissipe, la parole se libère. À ce jour, près d’une centaine de femmes, dont les actrices Rosanna Arquette, Judith Godrèche, Emma de Caunes, Angelina Jolie, Asia Argento, les productrices Salma Hayek et Brit Marling, disent avoir été victimes du producteur et quatorze d’entre elles affirment avoir été violées.
À Hollywood, c’est un séisme. Les accusations de viols et d’agressions sexuelles pleuvent. De grands noms du cinéma s’affichent pour le pire à la une des journaux : les acteurs Kevin Spacey et Dustin Hoffman, le réalisateur Brett Ratner… « C’est un chaos qui, je l’espère, va ouvrir la voie à la guérison », confie l’actrice Jessica Chastain. Mais les violences sexuelles ne sont pas l’apanage d’Hollywood.
Sur les réseaux sociaux, un hashtag se répand comme une traînée de poudre : #Metoo, « Moi aussi ». Reprise des millions de fois, terrible ponctuation de récits laconiques, toujours douloureux, parfois rageurs, la formule résonne, dans le monde entier, comme un cri de révolte, d’affranchissement, d’autodéfense collective.
Les révélations se succèdent dans les mondes de la mode, des médias, de la politique. Le 1er novembre 2017, la déferlante emporte le ministre britannique de la Défense, Michael Fallon. Accusé de harcèlement sexuel, il démissionne. Mis en cause à leur tour, le vice-premier ministre Damian Green et le secrétaire d’État au Commerce international Mark Garnier quittent le gouvernement de Theresa May. En Norvège, un millier de musiciennes et chanteuses dénoncent, dans une tribune, les viols, les agressions et le harcèlement sexuel…
En France, dès le 14 octobre 2017, la journaliste Sandra Muller lance sur Twitter le hashtag #Balancetonporc. En soixante-douze heures, il suscite 160 000 messages. Appel à la délation ? Non. En réalité, contrairement à ce que prétendent, par exemple, les signataires de l’indécente tribune sur la « liberté d’importuner », très peu d’agresseurs sont nommément cités. Ceux qui appellent les femmes à préférer les commissariats et les prétoires aux réseaux sociaux sont vite renvoyés dans les cordes d’accablantes statistiques. D’après le Collectif féministe contre le viol, chaque année en France, 86 000 femmes sont victimes de viols ou de tentatives de viol. Dans 90 % des cas, les victimes connaissent leur agresseur. Seules 21 % d’entre elles se rendent au commissariat, 10 % déposent plainte. Problème, la plupart des affaires sont classées et seulement 1 à 2 % des viols aboutissent à une condamnation des auteurs en cour d’assises.

Une extraordinaire libération de la parole des femmes

Des femmes de tous horizons, de toutes conditions sociales témoignent. Le standard du numéro vert Viols femmes informations explose, comme au moment de l’affaire DSK, en 2011. « Les milliers de récits qui déferlent sur la Toile, les faits de harcèlement au travail, de harcèlement dans l’espace public, d’agressions sexuelles, de viols, d’agressions physiques ou de meurtres incarnent la réalité des violences sexistes mieux que n’importe quelle enquête statistique aurait pu le faire et alors que les chiffres révélant leur ampleur sont pourtant connus depuis longtemps en France », constate, dans l’Humanité, la philosophe Elsa Dorlin. Cette extraordinaire libération de la parole suscite la stupeur, l’empathie, l’indignation mais aussi, chez certains et certaines, la peur ou la réprobation. Quoi qu’il en soit, elle jette une lumière crue, nouvelle, sur un fait social massif. Un basculement se produit dans la conscience collective. En fait, ce basculement a commencé bien avant l’affaire Weinstein. Il était perceptible, déjà, dans l’explosion de colère et la puissante mobilisation qui avaient suivi, en Inde, le viol collectif mortel de Jyoti Singh, une étudiante de 23 ans, dans un autobus de New Delhi, le 16 décembre 2012. Il était sensible dans les grandes manifestations de 2014 et 2016, en Espagne et en Pologne, pour la défense du droit à l’IVG, dans le combat des Tunisiennes pour inscrire l’égalité entre hommes et femmes au cœur de la Constitution postrévolutionnaire, dans le mouvement contre les féminicides en Amérique latine, dans le geste des milliers d’Islandaises qui ont quitté le travail à 14 h 38, le 24 octobre 2016, pour protester contre les inégalités salariales.
En fait, une nouvelle vague féministe prend corps depuis le tournant des années 2000, elle intègre les combats, les héritages des vagues précédentes, se connecte aux luttes contre toutes les formes de domination. « Au siècle précédent, les femmes étaient encore à la conquête des lois. Pour le droit à l’avortement et pour que le viol passe de délit à crime. Une fois que toutes les lois ont été obtenues, il reste des problèmes que le droit ne peut pas régler. Voyez, on a pu changer la loi sur le viol, ça ne modifie pas, dans l’imaginaire, le droit de cuissage, qui n’est pas inscrit dans la loi, parce que c’est simplement le droit du plus fort », analysait Geneviève Fraisse au lendemain des premières révélations sur l’affaire Weinstein. Pour cette philosophe et historienne de la pensée féministe, c’est désormais « l’imaginaire social qui doit changer ». L’imaginaire social… et les rapports de pouvoir qui perpétuent les violences, les normes patriarcales, les discriminations, les inégalités. S’agissant des violences sexuelles, elles sont clairement l’expression d’une volonté de l’agresseur de prendre le pouvoir sur le corps de l’autre. Dans l’entreprise, dans la fonction publique, dans les champs politique, syndical, médiatique, l’inégal accès des hommes et des femmes aux postes de responsabilité reste une réalité flagrante. Arrêter les coups, mettre un terme aux violences, aller vers une égalité pleine et entière entre hommes et femmes dans tous les domaines suppose donc, par-delà les tempêtes électroniques, d’agir, par les luttes, sur des rapports de pouvoir « non pas naturellement définis, mais historiquement et socialement construits », pour reprendre les termes de la philosophe Annie Bidet-Mordrel. Dans ce mouvement de repolitisation, alors que les inégalités et les dominations se reconfigurent, se déplacent, s’euphémisent, « les luttes de libération des femmes doivent aussi porter sur la justice sociale, l’antiracisme, l’anticapitalisme, l’anti-impérialisme », insiste la politologue et militante féministe Françoise Vergès.
Un mouvement s’est bel et bien levé, il n’épargne aucun lieu du monde. Et si même les nonnes du Vatican se révoltent contre les prélats qui les exploitent, c’est qu’à n’en pas douter il se passe quelque chose…
Journaliste à la rubrique Monde